samedi 30 décembre 2017

La Nouvelle Année

Pamphile Le May (1837-1918)

(Source : Québec éternelle,
promenade photographique
dans l'âme d'un pays
, p. 118)




   Qu'apportes-tu, nouvelle année ?
   Viens-tu de roses couronnée
   Comme la Vierge des amours ?
   Ta main tient-elle le calice,
   Ou bien la coupe de délice
   Où devront s'abreuver nos jours ?

   Viens-tu, de mille appâts suivie, 
   Donner à notre pauvre vie
   De nouvelles illusions ?
   Ou viens-tu comme un léger rêve
   Qui nous enivre, et qui s'achève
   En amères déceptions ?

   Au pauvre enfant pur comme un ange
   Dont le bonheur est sans mélange
   D'amertume ni de regrets ; 
   Qui rit aux baisers de sa mère,
   Murmure le nom de son père,
   Apportes-tu de beaux jouets ?

   As-tu, pour la folle jeunesse,
   Une coupe pleine d'ivresse,
   Pleine d'espérances et d'amours ?
   As-tu quelque limpide étoile
   Pour l'éclairer ? Un large voile
   Pour jeter sur ses mauvais jours ?

   Ou, sur ton aile diaphane,
   Pour le jeune coeur qui se fane
   Au souffle de l'iniquité,
   As-tu quelques rayons de grâce,
   Un souvenir que rien n'efface
   Du droit chemin qu'il a quitté ?

   As-tu quelque douce espérance,
   De tout malheureux qui périt ?
   Un appui pour la pauvre veuve ?
   Pour l'orpheline qui s'abreuve
   De pleurs aujourd'hui que tout rit ?

   Viens-tu, comme un nuage sombre
   Dont on regarde flotter l'ombre
   Sur les champs émaillés de fleurs,
   Nous apporter ces longs orages
   Qui sèment au loin leurs ravages,
   Sillonnent et brisent nos coeurs ?

   Viens-tu tracer une nouvelle ride
   Sur le front pensif et livide
   De l'homme qui vit malheureux ?
   Briser la main qui le protège
   Et mêler des rayons de neige
   À l'ébène de ses cheveux ? [...]

   Hélas ! Nos rapides années
   Ressemblent aux feuilles fanées
   Que les vents roulent au vallon !
   On les cueillit pour une fête,
   On en couronna notre tête,
   Puis on les foula du talon. 

   Pourquoi cette gaieté si vive
   Quand la nouvelle année arrive
   Et nous éloigne du berceau ? 
   Sommes-nous las de cette vie ?
   Regardons-nous avec envie
   Ceux qui dorment dans le tombeau ?

   Non ! Non ! faibles enfants des hommes,
   Ces pensées, comme des fantômes, 
   Troubleraient nos esprits peureux ! 
   Non ! Non ! il est si doux de vivre
   Quand l'espérance nous enivre,
   Même quand on est malheureux ! 

   Chaque nouvel an nous enchante,
   Comme l'œil d'une vierge aimante,
   Comme le soupir de son coeur. 
   Nous tressaillons quand il se lève,
   Car nous avons cru, dans un rêve,
   Qu'il nous apportait du bonheur !

   Bonheur ! ... illusion futile !
   Songe trompeur ! ombre fragile
   Qui fuit quand on croit la tenir ! 
   Hélas ! l'attendrons-nous sans cesse
   Du temps qui passe avec vitesse,
   Qui passe et qui ne peut revenir ! 

                    Pamphile Le May (1865)




Tiré de : Pamphile Le May, Essais poétiques, Québec, G. E. Desbarats Imprimeur-Éditeur, 1865, p. 237-240. 

De Pamphile Le May, les Poésies Québécoises Oubliées ont aussi présenté : Le poète pauvre.

Pour en savoir plus sur Pamphile Le May, cliquer ICI. 


Essais poétiques, recueil de Pamphile LeMay
 d'où est tiré le poème La Nouvelle Année,
ci-haut.

(Cliquer sur l'image pour l'élargir)

Pamphile Le May avec deux de ses filles et le chien de la famille, probablement
à Deschaillons-sur-Saint-Laurent, où il vécut ses dernières années.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Plaque en souvenir de Pamphile Le May devant la Chapelle de
procession de Saint-Louis
,  à Lotbinière, où Pamphile Le May est né.

(Photo : Daniel Laprès, 2017 ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)


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